«  Laissez-moi vous parler de Doraleen, c'est l'une des jeunes femmes, les plus douces, les plus rêveuses que j'ai pu connaître au cours de ma vie. Je n'ai jamais vraiment compris pourquoi une telle maladie l'avait touchée elle, mais peu importe. D'après mes études, Doraleen est une jeune femme timide et rêveuse, pleine d'imagination et de gaîté, elle est au premiers abords quelqu'un de délicieux. Je dois dire que j'ai été étonné par son calme et sa capacité à s'émerveiller de tout, pourtant, alors qu'un simple rayon de soleil peut la faire fredonner toute la journée, une contrariété ou une simple pensée peut la transformer en une personne violente et irritable. C'est un style de bi-polarisme que je n'avais jamais vu auparavant. Je l'ai vu rire et sourire, se réjouir de tout et l'instant d'après entrer dans une colère noire, je pense sincèrement que lors d'une phase de crise elle pourrait tuer, sa délicatesse et sa gentillesse laissent place à une profonde vulgarité doublé d'un sadisme certain. Je l'ai vu passé des jours à être à la fois vulgaire dans ses paroles et son comportement, aguicheuse et presque meurtrière. Et puis je la croisais le lendemain, elle était romantique et étourdie, gambadant comme une enfant dans un pré où les fleurs parsèment de leurs couleurs l'herbe déjà verte. Je peux certes vous en dire bien plus, mais décrire Doraleen, c'est au final décrire deux personnes presque totalement différente, qui s’entrecroisent régulièrement. La jeune femme aux yeux clairs a pourtant, peu importe son humeur cette imagination hors norme, elle va se traduire de différente manière, s'accordant au style de sa bi-polarité, mais toujours son originalité ressort, ainsi que son extravagance, son ex entrisme, cette manière de parler en agitant les mains pour illustrer chacun de ses propos. Pourtant la violence se voit parfois remplacé par la candeur, et la sensualité est balayé par une réelle pudeur. C'est comme regarder un enfant se transformer en monste, je n'ai jamais été aussi attendri par une patiente, vu tant de bonté en une seule personne, pourtant elle m'effraie parce que d'un instant à l'autre elle peut abandonner Candide pour devenir Satan et cela je crains pourra entraîner des drames. »

La morsure de l'hiver tétanisait encore les arbres qui longeaient les rues de Chicago, les derniers coups de vent d'un hiver touchant à sa fin refroidissait les passant qui s'aventuraient dans les méandres de la cité. La neige ne tombait et une lune invisible rendait le ciel noir et opaque. Dans le dédale d'un hôpital résonnait les cris de quelques femmes proches de la délivrance. Parmi celle-ci, une jeune institutrice poussait pour mettre au monde son premier enfant. Elle la rêvait douce et délicate, avec les grands yeux de son père et sa tignasse à elle. Après un dernier cri Doraleen venait au monde, elle aurait pu réaliser tout les rêves de ses parents, elle aurait pu.


Les jours coulaient heureux et sans soucis pour la famille Child, Doraleen était choyée et faisait preuve d'une joie de vivre hors du commun, elle courait dans les parcs, hurlant qu'elle était chasseuse de dragons et qu'une fée l'avait dotée de pouvoir merveilleux. Elle riait à gorge déployé et s'amusait à se balancer de plus en plus près du ciel. Pourtant, âgée d'à peine dix ans, la jeune enfant dissimulait une part sombre. Un jour alors que sa mère l'avait emmené comme à son habitude au parc le plus proche, Doraleen fut prise d'un comportement étrange, d'une crise de folie comme plus tard l’appellerait sa mère. Un jour ensoleillé, des plus banal, et pourtant la vie de la famille Child choisit de sombrer dans l'horreur. Doraleen était prise dans son monde imaginaire, elle courait à travers les jeux pour enfants, bras en avant, une épée invisible entre les mains. Tout se déroulait à merveille. Du léger pépiement des oiseaux, aux rires enfantins. Mme Child lisait un magazine sur un banc, levant les yeux de temps à autre pour surveiller sa fille. Doraleen courait, de plus en plus vite, sans regarder ce qui se passait devant elle, et puis, brusquement, elle bouscula un enfant, le projetant sur un ou deux mètres. Personne ne sait si c'est les larmes de l'autre enfants, ou la contrariété d'avoir rencontré un obstacle qui déclencha la crise, mais Doraleen entra dans une rage noire. Une rage malsaine pour une enfant. Elle attrapa d'abord des petits cailloux, les jetant sur la pauvre victime qu'elle avait bousculer, puis ce fut des pierres plus grosses. Les sanglots résonnaient, ils avaient remplacé la douce mélodie du printemps. Les parents avaient accouru, le sang avait coulé et Mme Child n'avait pas compris. Ceci aurait pu être une exception, mais non, l'âge empire certaines choses , celle-ci en fait partie !